Siegfried Haas est né en Allemagne en 1921 d’une famille d’intellectuels qui le sensibilisent très tôt aux arts.
En 1933, Adolf Hitler nommé Chancelier du Reich, installe un régime autoritaire qui interdit les partis politiques et les syndicats, bafoue les églises et les religions au profit d’un mouvement unique : le Parti Nazi. Dès cette époque, les opposants vivent une situation d’insécurité et de peur (emprisonnement, déportation, assassinat).
La famille Haas manifeste une antipathie naturelle au nouveau régime mis en place. Refusant d’intégrer leurs enfants aux jeunesses hitlériennes, les parents de Siegfried le scolarisent en Hollande dans un monastère franciscain entre 1934 et 1938. Il revient en 1940 à Schramberg où il passe son baccalauréat et entame des études supérieures à l’Académie des Beaux-Arts de Stuttgart où il sympathise avec un mouvement de résistance étudiant, connu sous le nom de « La Rose Blanche ».
D’origine bourgeoise, de pluralisme politique, imprégnée par la philosophie humaniste et animée d’une foi chrétienne profonde (catholiques, protestants, orthodoxes toujours croyants mais parfois non pratiquants), la Rose Blanche est créée en 1942 par deux étudiants en médecine Hans Scholl et Alexander Schmorell, rapidement rejoints par d’autres. Les membres de la Rose Blanche luttent de manière pacifique et non violente en distribuant des tracts pour dénoncer la dictature et les crimes puis pour réclamer l’arrêt de la politique d’extermination des juifs. Chaque tract s’attaque à un point de la politique du régime hitlérien et le mouvement grossit et s’étend dans l’Allemagne.
Siegfried Haas fait la connaissance de Hans Scholl et contribue à étendre le mouvement dans la région de Stuttgart sous le nom de « Communauté pour la Paix et le Développement ».
En février 1943, Hans Scholl, sa sœur Sophie et Christoph Probst sont arrêtés, condamnés à mort et exécutés. Dès lors, la Rose Blanche est démantelée. Les arrestations et déportations se multiplient chez les résistants. Ceux qui survivent se cachent, s’enfuient ou intègrent consciemment l'armée régulière allemande, la Wehrmacht, pour sauver leur peau. C'est le cas de Siegfried Haas qui s'y engage en décembre 1944 et y suit un stage d’officier. C’est là, sur les bords du lac de Constance qu’il est fait prisonnier par la première armée française en avril 1945.
Prisonnier en France, il se retrouve notamment au camp de Brioude (Haute-Loire) où, racontera-t-il des années plus tard, il se retrouve un temps à la morgue, les médecins militaires étant convaincus que sa mort est imminente.
Siegfried Haas survit et arrive au camp B « Camp Hôpital Régional » de Clermont-Ferrand après le 8 mai 1945. C’est là qu'il rencontre le soldat Louis Irlande (né à Jou-sous-Monjou), affecté à la garde des prisonniers allemands. Celui-ci l’aide à survivre en lui procurant discrètement de la nourriture.
Au mois d’avril 1946, Louis Irlande termine son service militaire et retourne chez lui, dans le Cantal. Quant à Siegfried Haas, il est rapatrié en Allemagne, au titre de « grand malade ».
Louis Irlande est bientôt ordonné prêtre. Nommé vicaire à Saint-Géraud pendant un an, il est ensuite curé des paroisses de Rageade et de Chazelles sur le plateau de la Margeride puis de Brezons.
Au cours de cette période, Louis apprend que Siegfried a survécu et les deux hommes reprennent contact par le biais d’une correspondance.
La belle amitié se mue en véritable fraternité, avec les visites que se rendent les deux hommes, en France et en Allemagne, en compagnie de leurs familles et de leurs amis.
En 1968, Louis Irlande est nommé curé de Lafeuillade-en-Vézie, avec la charge de la paroisse de Lacapelle-del-Fraisse.
Lors de son installation dans la paroisse de Lafeuillade-en-Vézie, l'abbé Irlande découvre une église moderne (la plus récente du diocèse de Saint-Flour) mais dont l'ornementation reste à faire. Il pense tout naturellement à Siegfried, son ami devenu un artiste d'art sacré de renom.
Siegfried Haas fait cadeau du chemin de croix qui comprend significativement quinze stations au lieu de 14 habituellement (la 15ème étant la Résurrection), comme pour montrer qu'après les croix de la guerre vient la lumière de la réconciliation.
En 1974, l'abbé Irlande est chargé de la paroisse de Prunet : l'ami artiste offre alors deux vitraux, qui seront installés solennellement en 1979.
Siegfried Haas décède en avril 2011 et laisse une oeuvre artistique marquée par les horreurs de la guerre et par sa captivité.
Le pays du Veinazès est honoré d'avoir, dans son patrimoine artistique, plusieurs de ses œuvres.
Au travers du chemin de croix, du relief des disciples d'Emmaüs, du tableau de Saint-François d'Assise de l'église de Lafeuillade-en-Vézie et des vitraux de l'église de Prunet, c'est un message de paix et de fraternité que continue de nous transmettre l'oeuvre de Siegfried Haas.
Documentaire consacré à Siegfried HAAS
Reportage consacré à Louis IRLANDE (1923-2020)
Bernard Coste, "Douleurs et couleurs. Histoire d'une amitié", Chronique du Veinazès N° 34, 2009.
Marie-Hélène Ricard, notes publiées dans Douleurs et couleurs. Histoire d'une amitié, Chronique du Veinazès N° 34, 2009.
Edouard Bouyé, Revue de la Haute-Auvergne, juillet 2009.
Siegfried Haas (1921-2011), Lettre du Veinazès N°38, février 2011 - juin 2011.
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