La mémoire chantante du Veinazès
Native du village de Lacaze (Lacapelle-del-Fraisse), Louise Chateau (épouse Reichert) est dotée d'une mémoire exceptionnelle. Sa capacité à tout retenir lui permet de conserver les refrains traditionnels interprétés par son père et ses grands-parents. Durant sa jeunesse, elle est souvent sollicitée pour interpréter son répertoire à l'issue des repas de fête.
A l'âge adulte, elle se montre bien peu conventionnelle. Libre de mœurs, chasseuse ("cassaïre" en occitan), braconnière à ses heures et propriétaire d'une voiture, elle est aussi un redoutable pilier de bistrot adepte du «perniflard».
Sa forte personnalité, sa moralité particulière, voire certains pouvoirs surnaturels qu’elle entretient, inquiètent comme ils séduisent son voisinage.
Dans les années 1970, le « revival » du chant traditionnel réhabilite « la Louise », interdite par arrêt de justice à fréquenter son village natal.
Les collecteurs Catherine Perrier, Emmanuel Lazinier et John Wright la découvrent en août 1971, installée à Pervinquiers de Saint-Hippolyte (Aveyron). Impressionnés par ce personnage hors du commun, ils ne la quitteront plus et mettront en valeur son exceptionnel répertoire musical. Dès lors, de nombreux musiciens et chanteurs iront à sa rencontre.
En cinq ans, Louise Reichert participe à de nombreux festivals et soirées folk, devenant le chantre de la chanson traditionnelle auvergnate. Véritable vedette, elle subjugue aussi les journalistes, friands de son franc-parler et de son goût de la noce. Tous ceux qui l'approchent participent désormais à la construction d'un mythe car Louise raconte, exagère ou travestit les événements de sa vie en sachant occulter sa part d’ombre.
En 1975, elle franchit une nouvelle étape dans la renommée, en participant à la célèbre émission dominicale de Jacques Martin, « Le petit rapporteur ». Cette femme, mise à l'écart de sa communauté pour des faits de grivèlerie, devient alors l'une des ambassadrices les plus connues de la Châtaigneraie cantalienne.
En 1976, tandis que plusieurs radios programment ses chansons, elle part durant trois semaines « en tournée » aux Etats-Unis. Cerise sur le gâteau, le dimanche 7 novembre 1976, Louise Reichert fête ses 80 ans et la radio nationale « France Musique » lui consacre une journée spéciale.
Bientôt, sa santé décline. D’hôpital en établissement de repos puis en maison de retraite, Louise Reichert décède à Mur-de-Barrez en 1985.
Ce qui reste aujourd'hui de ce personnage pittoresque du Veinazès, c'est cette voix puissante, enjouée, méridionale qui ronfle en des airs endiablés, c'est ce verbe rocailleux et séduisant qui sert un sens hâbleur de la répartie.
L’inventaire effectué par Catherine Perrier des nombreux enregistrements réalisés au cours des années 1970 porte à 257 le nombre de titres chantés par Louise Reichert, soit :
138 en français (73 traditionnels et 65 « modernes »)
119 en occitan (112 traditionnels et 7 « modernes »).
Ces enregistrements ont été réalisés par Catherine Perrier et John Wright entre 1971 (avec Emmanuel Lazinier) et 1980 ; par Lani Herrmann en 1972 et 1976, par Howard Glasser en 1976, par Radio-France en mars et novembre 1976, par Pierre Boissière entre 1974 et 1978, par Albert Ricard, Jean-Pierre Cassagnes, Philippe Roux, Yann Leroi-Gourhan, Claude Rochat, Hubert Poirée, le Smithsonian Institution.
Une copie d’une grande partie de ces enregistrements a été déposée aux Archives départementales du Cantal.
Inventaire réactualisé en 2006 et publié dans la revue "Pastel".
Fernande Ricard, Lo convise de La Caçaïra, revue Monde en Òc, 1991, N°2 et 3.
Catherine Perrier, Louise Reichert (1896-1985) et ses chansons, revue Pastel, 2004-2006
Fonds Louise Reichert - Musée du Veinazès.
Bernard Coste, biographie de Louise Reichert, (manuscrit en cours d’édition).
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